Afrique/ la guerre des ondes : Mobutu,Tombalbaye et Bokassa

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Il était une fois Mobutu, Tombalbaye et Bokassa 1er, trois chefs d’Etat d’Afrique centrale, notamment le Tchad au nord, la République démocratique du Congo au sud et la République centrafricaine au centre.

Cette dernière ayant l’avantage de partager des frontières communes avec les deux autres et aussi d’avoir les mêmes groupes ethniques, les kaba au Tchad, et les yakoma en Rdc.

Bref, ces trois dirigeants décident un jour de créer l’UEAC (Union des États de l’Afrique centrale).

C’est ainsi que le 2 Avril 1968, le président Jean-Bedel Bokassa annonce avec fracas, le retrait de la RCA de l’UDEAC (Union Douanière et Économique de l’Afrique Centrale) pour intégrer l’UEAC (Union des États d’Afrique Centrale ) laquelle devrait également regrouper le Congo-Brazzaville, le Gabon, le Rwanda et le Burundi. Mais au moment de la signature de la charte de ladite organisation régionale à Fort-Lamy (actuel Ndjaména) les autres pays manquent à l’appel jugeant le projet peu crédible.

Toujours est-il que Kinshasa, Bangui et Fort-Lamy s’engagent à renforcer leurs liens d’amitié et de coopération tripartite au niveau sous régional.

Une avenue portant les noms des trois chefs d’Etat fut inaugurée dans chacune des capitales de l’Union.

Dans la foulée, Mobutu acquiert une villa au bord de la rivière Oubangui à Ngaragba. Tandis que Bokassa devient aux yeux des Congolais « Mwana mboka » (fils du pays).

De même qu’il décide de commun accord avec son homologue congolais d’abolir les frontières entre leurs deux pays.

D’autre part, la diplomatie devient plus agissante sous la houlette des ministres des Affaires étrangères des pays membres de l’union, surnommés à juste titre par Victor Teteya de la presse centrafricaine « Les 3J et les 3B », à savoir Justin-Marie Bomboko de la RDC, Jean-Arthur Bandio de la RCA et Jacques Baroum du Tchad.

Mais l’idylle fut de courte durée.

En effet, devant le tollé régional et international suscité par ce projet impromptu aux lendemains peu prometteurs, Bokassa réintègre quelques mois plus tard, en novembre 1968, sa famille d’origine, l’UDEAC.

D’où la grosse colère de ses pairs Joseph Désiré Mobutu et François Tombalbaye qui agitèrent la menace d’une offensive armée aux frontières, sur fond de guerre des ondes.

Du coup, Bokassa est surnommé au Congo « Mwana zamba » (fils de la brousse ou de la forêt).

Ce à quoi, celui-ci rétorqua de façon virulente avec son franc-parler légendaire sur Radio Centrafrique, s’en prenant vertement à ses alliés d’hier : « Comment !? Mbi yeke président tongana ala. Mais lakoue, ala yeke boungbi tere ti ala ousse ti pa Mbi ! (Je suis chef d’Etat comme eux (Mobutu et Tombalbaye; mais chaque fois, ils se réunissent en aparté pour me dénigrer), martelait-il.

Puis d’ajouter : « Quand même, Tombalbaye ayeke Nzapa pépé ! »(Tombalbaye n’est tout de même pas le Bon Dieu !).

Au moment où le Général De Gaulle lançait un appel pour libérer la France, lui Tombalbaye, avait fui.

Par contre moi, Bokassa, j’avais répondu présent en m’enrôlant dans l’armée française. Aujourd’hui, Tombalbaye ose m’insulter.

Or, lorsqu’on insulte un soldat, c’est toute l’armée nationale qu’on a insultée.

C’est pourquoi, je prends à témoin, mon frère d’armes, le chef d’état-Major des forces armées tchadiennes, le Général Jacques Doumro qui m’écoute en ce moment.

Il appréciera et saura agir en conséquence».

Et de poursuivre « Tombalbaye dit qu’il est invulnérable ! Aucune balle ne peut l’atteindre parce qu’il est Sara ! Mais moi, Bokassa, je vous livre un secret.

Si quelqu’un veut tuer Tombalbaye, il n’a qu’à uriner sur son arme à feu et tirer.

Ça marchera ! Et puis, poursuit-il, Tombalbaye a éliminé un grand nombre de musulmans.

Il les attachait dans des sacs qu’il larguait d’un avion au-dessus du désert.

Tout comme il a tué Barthélémy Boganda, en mettant une bombe dans son avion … ! ».

A noter que durant cette guerre des ondes, l’effigie du président François Tombalbaye était promenée dans un cercueil à travers les rues de Bangui pour être enterrée au cimetière de Ndress.

S’agissant du président de la République démocratique du Congo, Bokassa disait : « Mobutu était un garde cercle.

Après avoir tué Lumumba, il a eu le grade de Général !.

D’ailleurs, dit-il, de tous les chefs d’Etat africains, seul le président Léopold Sedar Senghor a des bagages intellectuels. Nous autres, nous ne sommes que des sacs à dos ».

Évidemment, ces histoires étaient tout simplement de nature à régaler la galerie.

Car en dépit du retrait de la RCA de l’UEAC, les relations avec la RDC et le Tchad se sont consolidées davantage au fil du temps.

Et Mobutu et Tombalbaye devinrent plus que jamais soudés comme des frères siamois arborant le même style vestimentaire (Abacos, toque de léopard, écharpe, canne…).

En outre, tous les deux adoptèrent le recours à l’authenticité en changeant leurs prénoms chrétiens: Sesse Seko pour Mobutu et Ngarta pour Tombalbaye.

Quant à Jean Bedel Bokassa, l’enfant terrible du continent, sa versatilité se manifesta de nouveau le 16 octobre 1976 lorsqu’il se convertit à l’Islam sous le nom de Salah Eddine Ahmed Bokassa au grand dam de l’église catholique (sa confession d’origine) avant de renouer peu de temps après avec celle-ci.

Par ailleurs, n’est-ce pas lui (Bokassa) qui avait prôné le dialogue avec le régime ségrégationniste d’Afrique du Sud au moment où l’Apartheid était mis au ban de la société ?

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