LOI N° 07/008 DU 04 DECEMBRE 2007 PORTANT STATUT DE
L’OPPOSITION POLITIQUE
L’Assemblée nationale et le Sénat ont délibéré ;
L’Assemblée a statué définitivement ;
Le Président de la République promulgue la loi organique dont la teneur
suit :
CHAPITRE 1er : DES DISPOSITIONS GENERALES
Article 1er :
La présente loi organique détermine le statut de l’Opposition politique, conformément à l’article 8 de la Constitution. Elle définit l’Opposition
politique, fixe les droits et devoirs liés à son existence, à ses activités et à sa lutte pour la conquête démocratique du pouvoir.
Elle vise à maintenir le débat politique dans les limites de la légalité et du respect réciproque et à assurer une alternance démocratique.
Elle a pour but de consolider la démocratie pluraliste et de favoriser la participation de l’ensemble des forces politiques au renforcement de la conscience et à l’éducation civique.
Article 2 :
Aux termes de la présente loi organique, il faut entendre par
Opposition politique le parti politique ou le regroupement des partis politiques qui ne participent pas à l’Exécutif et/ou ne soutiennent pas son programme d’action aux niveaux national, provincial, urbain, municipal ou local.
L’opposition politique est parlementaire ou extraparlementaire selon qu’elle exerce au sein ou en dehors d’une assemblée délibérante.
Article 3 :
Les partis politiques et les regroupements politiques dans les
assemblées délibérantes font une déclaration d’appartenance à la majorité ou à l’Opposition politique, auprès des bureaux respectifs de l’Assemblée nationale, du Sénat, de l’Assemblée provinciale, des conseils de ville, municipal, de secteur ou
de chefferie.
Article 4 :
Est réputé avoir renoncé au statut de l’Opposition politique, le parti
politique ou le regroupement politique qui accepte de partager les responsabilités de l’Exécutif aux niveaux national, provincial, urbain, municipal ou local.
CHAPITRE II : DES DROITS ET DEVOIRS DE L’OPPOSITION POLITIQUE
Article 5 :
Le droit d’appartenir à l’Opposition politique est reconnu à tout parti
politique ou regroupement politique.
Article 6 : Les droits de l’Opposition politique sont sacrés. L’Opposition politique exerce librement ses activités dans le respect de la
Constitution, des lois et règlements de la République.
Lorsque l’état d’urgence ou l’état de siège est proclamé conformément aux dispositions des articles 85 et 86 de la Constitution, les droits de l’Opposition politique, à l’exception de ceux visés à l’article 61 de la Constitution, ne peuvent être suspendus ou restreints que dans les mêmes conditions que ceux des partis politiques ou des regroupements politiques qui composent ou soutiennent, selon
le cas, l’Exécutif aux niveaux national, provincial, urbain, municipal ou local.
Article 7 : Les partis politiques et regroupements politiques membres de l’Opposition politique jouissent des mêmes droits et sont assujettis aux mêmes devoirs, à l’exception de ceux spécifiques attachés à l’appartenance à l’Assemblée nationale, au Sénat, à l’Assemblée provinciale, aux conseils de ville,
municipal, de secteur ou de chefferie.
Article 8 :
L’Opposition politique a notamment le droit de :
1. Etre informée de l’action de l’Exécutif ;
2. Critiquer ladite action et, le cas échéant, formuler des contre-propositions, sous réserve du respect de la loi, de l’ordre public et des bonnes mœurs ;
3. Présider alternativement avec les députés et sénateurs de la majorité, les travaux des commissions de contrôle ou d’enquête de l’action de l’Exécutif ou d’en être rapporteur sans préjudice des prescrits des règlements intérieurs de chacune de ces Assemblées délibérantes ;
4. faire inscrire des points à l’ordre du jour des assemblées délibérantes.
Article 9 :
Le droit à l’information visé à l’article 8 est garanti à l’Opposition
politique sur toutes les questions importantes de la vie de la Nation.
Article 10 :
Les responsables des partis politiques et des regroupements
politiques de l’Opposition politique, à différents niveaux, sont reçus par les
autorités ou leurs représentants, à leur demande ou à l’initiative de celles-ci.
Article 11 :
Les groupes parlementaires de l’Opposition politiques jouissent d’un
droit de représentation proportionnelle à leur poids numérique dans les assemblées délibérantes. Cette représentation est explicitement déterminée par le règlement intérieur de l’institution concernée, aussi bien au niveau du bureau que des commissions
permanentes.
Article 12 :
Lors de la désignation aux fonctions nominatives par l’Assemblées
délibérantes au niveau national, provincial ou local, il est tenu compte des propositions des groupes parlementaires de l’Opposition politique et ce, dans la recherche de la cohésion nationale.
Article 13 :
Les membres de l’Opposition politique ont droit au libre accès et à
un égal traitement par les médias publics dans le cadre des émissions et programmes pour faire connaître leurs opinions. La couverture de leurs manifestations et la diffusion de leurs communiqués sont
assurées de manière équilibrée par les médias publics dans le strict respect du pluralisme et de l’objectivité, conformément aux règles de déontologie applicables à la profession de journaliste.
Le Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication veille à la bonne exécution de cette disposition.
Article 14 :
Nul ne peut, en matière d’accès ou de promotion à un emploi public,
faire l’objet d’une mesure discriminatoire en raison de ses opinions et convictions politiques ou de son appartenance à un parti politique ou à un regroupement
politique de l’Opposition politique.
Article 15 :
Aucun membre de l’Opposition politique ne peut être interpellé,
poursuivi, recherché, détenu ou jugé en raison de ses opinions politiques
exprimées dans le respect de la Constitution, des lois et règlements de la République.
Article 16 :
L’Opposition politique a notamment le devoir de :
1. Respecter la Constitution, les lois de la République et les institutions
légalement établies ;
2. Défendre les intérêts supérieurs de la Nation ;
3. S’abstenir de recourir à la violence comme mode d’expression et d’accès au pouvoir ;
4. Privilégier le dialogue et la concertation sur les grandes questions d’intérêt national et dans la résolution des différends politiques ;
5. Promouvoir le pluralisme politique et reconnaître le droit de la majorité à gouverner ;
6. Promouvoir la culture démocratique notamment par la tolérance, la non-violence et le soutien du principe de l’alternance dans le cadre d’une lutte politique pacifique ;
7. Concourir, par la libre expression, à la formation de l’opinion publique ;
8. Former et informer ses militants sur les questions touchant à la vie
nationale.
CHAPITRE III : DE L’ORGANISATION ET DU FONCTIONNEMENT DE
L’OPPOSITION POLITIQUE
Article 17 :
L’organisation et le fonctionnement de l’Opposition politique au
niveau national sont fixés par un règlement intérieur adopté par les députés nationaux et les sénateurs, membres de l’Opposition politique.
Article 18 :
Sans préjudice des droits dévolus à chaque parti politique ou
regroupement politique, l’Opposition politique, au niveau national, est
représentée par un porte-parole. Ses missions et ses prérogatives sont
déterminées dans le règlement intérieur.
Article 19 :
Sans qu’il ne soit nécessairement parlementaire, le porte-parole de
l’Opposition politique est désigné par consensus, à défaut, par vote au scrutin majoritaire à deux tours, dans le mois qui suit l’investiture du gouvernement, par les députés nationaux et les sénateurs, membres de l’Opposition politique, déclarés conformément à l’article 3 de la présente loi.
Les députés et les sénateurs de l’Opposition politique se réunissent, à cet effet, sous la facilitation conjointe des bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat, à
la demande écrite de tout groupe parlementaire ou politique de l’Opposition politique, selon le cas.
Article 20 :
Le président de l’Assemblée nationale notifie le procès-verbal de la désignation du porte-parole de l’Opposition politique aux institutions de la République.
Le règlement intérieur de l’Opposition politique et le procès-verbal de désignation
du porte-parole de l’Opposition politique sont publiés au journal officiel de la République.
Article 21 :
Le porte-parole de l’Opposition politique a rang de ministre d’Etat au
niveau national et du ministre provincial au niveau provincial. Il jouit des avantages et immunités y afférents.
Article 22 :
Les dispositions des articles 17 et 18 s’appliquent, mutatis mutandis, à l’Opposition politique aux niveaux provincial, urbain, municipal et
local.
Article 23 :
L’Opposition politique aux niveaux national, provincial, urbain,
municipal et local bénéficie d’une dotation du trésor public pour assurer le fonctionnement de ses structures.
Article 24 :
Les fonctions de porte-parole de l’Opposition politique prennent fin
notamment par décès, démission, empêchement définitif, incapacité
permanente, condamnation définitive à une peine de servitude pénale principale pour une infraction intentionnelle, acceptation d’une fonction au sein de l’Exécutif
ou désaveu par la majorité des membres de l’Opposition politique.
D’autres causes de fin de fonctions du porte-parole sont déterminées dans le règlement intérieur.
CHAPITRE IV : DES DISPOSITIONS FINALES
Article 25 :
Sans préjudice d’autres peines prévues par la loi, toute autorité
publique, tout agent de l’administration publique ou agent dépositaire de l’autorité publique qui se rend coupable d’acte de restriction directe ou indirecte
des droits de l’Opposition politique est puni d’une servitude pénale principale de dix jours à un mois et d’une amende de cinquante mille à cinq cent mille francs congolais ou d’une de ces peines seulement.
Article 26 :
Lorsque les actes de restriction et de discrimination s’accompagnent
d’actes de violence, leur auteur est puni conformément au Code pénal.
Article 27 :
Tout responsable, tout membre de l’Opposition politique qui se rend
coupable d’actes de violence dans l’exercice des droits lui reconnus par la présente loi est puni des peines prévues par le Code pénal.
CHAPITRE V : DES DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES
Article 28 :
Les dispositions des règlements intérieurs organisant les assemblées
délibérantes : l’Assemblée nationale, le Sénat, l’Assemblée provinciale, les
conseils de ville, de commune, de secteur et de chefferie, se conformeront à la présente loi.
Article 29 :
Les dispositions des articles 11 et 28 de la présente loi n’entreront
en vigueur qu’à la prochaine législature en ce qui concerne l’Assemblée nationale, le Sénat et les Assemblées provinciales.
Article 30 :
Toutes les dispositions antérieures contraires à la présente loi sont
abrogées.
Article 31 :
La présente loi entre en vigueur à la date de sa promulgation.
Fait à Kinshasa, le 04 décembre
2007
Joseph KABILA KABANGE
Pour copie certifiée conforme à l’original
Le 04 décembre 2007
Le cabinet du Président la République
Raymond TSHIBANDA N’TUNGAMULONGO
Directeur de Cabinet
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